La directive MIF 2 s’imposera aux conseillers en gestion de patrimoine en janvier 2017

Le 17 décembre 2014 Expertises

Retrouvez les dernières évolutions MIF 2 à fin 2017 dans un article rédigé par Vanessa Descamps, Responsable Distribution – Conformité au sein du département Conformité, Contrôle Interne et Risques Opérationnels de La Française.

Chacun devra bien mesurer les conséquences du choix entre les statuts de conseiller indépendant ou non, explique en substance Dominique Dupont, Directrice Conformité, Contrôle Interne et Risques Opérationnels du Groupe La Française

  • L’Esma, l’Autorité européenne des marchés financiers, avait lancé avant l’été une consultation sur la directive MIF 2. Quelles sont les prochaines étapes attendues ?

Le Parlement européen a adopté, le 15 mai 2014, la nouvelle directive sur les Marchés d’instruments financiers (MIF 2), qui encadre entre autres la distribution de produits financiers dont les OPCVM. Puis le texte a été transmis à l’Esma, qui a lancé une consultation s’achevant fin décembre. Les échanges se poursuivent actuellement, dans la perspective d’une adoption du texte par la Commission européenne mi-2015, au plus tard. Chaque pays européen devra retranscrire la directive en droit local en 2016, afin surtout qu’elle s’impose aux acteurs à partir de janvier 2017. D’ici cette date, les conseillers en gestion de patrimoine devront avoir opté pour leur nouveau statut.

 

  • La directive MIF 1 imposait déjà certaines règles en matière de relation avec les clients. Quelles sont les principales contraintes supplémentaires qui seront issues de MIF 2 ?

La directive MIF 1 était effectivement déjà une révolution, mais elle ne touchait qu’indirectement au système des rétrocessions au travers des dispositions liées à l’encadrement des conflits d’intérêts. Elle a nécessité d’acquérir de nouveaux réflexes en termes de connaissance du client, de transparence sur le mode rémunération, de gestion des conflits d’intérêts. Avec MIF2 , les conseillers devront à l’avenir, s’ils souhaitent continuer à percevoir des rétrocessions de commission de la part de leurs fournisseurs, obtenir l’acceptation de leurs clients et justifier d’une amélioration de la qualité du service financier délivré. Le régulateur français avait déjà en partie anticipé cette évolution, puisque l’AMF avait publié une recommandation en juillet 2013, rappelant ce principe d’« amélioration du service au client et d’obligation d’agir au mieux des intérêts des clients pour le conseil en investissement ». MIF 2 ajoute toutefois une notion nouvelle. Il s’agira en effet d’apporter un service supplémentaire, qui n’était pas rendu jusqu’à maintenant : il est demandé un accompagnement permanent des clients, afin de s’assurer que chaque produit reste bien adapté au profil de chacun des souscripteurs. Le conseiller devra pouvoir prouver qu’il a bien eu des échanges à ce sujet avec ces clients, leurs échanges et conversations devront ainsi être même enregistrés tout au long de la relation.

MIF2 introduit la notion de double statut, indépendant ou non.  Est dépendant, le conseiller qui percevrait des commissions dans le cadre défini ci-dessus. Est indépendant, le conseiller qui choisirait de percevoir des honoraires de conseil. Il devra ainsi présenter un éventail suffisamment large de produits, sans être liés par des conventions de distribution (et a fortiori par des relations capitalistiques), et apporter une prestation de conseil indépendante, être capables d’exprimer une opinion au sujet d’une large gamme de produits.

 

  • Dans ce nouveau cadre, comment devront évoluer les offres des sociétés de gestion ?

Tout d’abord, les sociétés de gestion devront s’adapter en proposant de nouveaux services et de nouvelles gamme de parts de fonds adaptées au statut choisi par les conseiller et son mode de rémunération directe par le client ou indirecte par les producteurs. C’est déjà ce qui a été mis en œuvre au Royaume-Uni avec les parts dites « RDR », dans le sillage de l’entrée en vigueur au 1er janvier 2013 de la « Retail Distribution Review ». Par ailleurs, en termes de relations avec les CGP, qui ne pourront plus bénéficier d’avantages monétaires, ni non monétaires, la question de l’accès à l’information large sur les produits va se poser. Mais dans la mesure où les conseillers devront offrir des services additionnels de suivi des investissements de leurs clients (information sur les produits, leurs évolutions, leurs changements, mais aussi information sur le contexte macroéconomique et les marchés), les sociétés de gestion devront les accompagner dans cette démarche. Le Groupe La Française analyse actuellement tous les impacts de la directive et devrait préciser/présenter au cours de l’année 2015, à ses partenaires distributeurs de nouveaux services, modes de collaborations dans le cadre des relations qui se sont développées depuis de nombreuses années.

 

  • La directive MIF encadre la distribution d’OPCVM. L’encadrement de la distribution de contrats d’assurance-vie suivra-t-il le même chemin ?

Le régulateur européen veut traiter en effet de la même façon les instruments financiers entrant dans les contrats d’assurance-vie. Le calendrier de la future DIA 2 (Directive Intermédiation en Assurance) n’est pas encore établi, mais « DIA 1,5 » prévoit déjà d’organiser la transparence sur les modes de rémunération en informant le client de leur perception. Il est vrai qu’aujourd’hui, dans cette période intermédiaire, il y a une distorsion de concurrence entre le marché de l’assurance-vie et celui des produits financiers (OPCVM, EMTN, …).

 

  • Vous avez fait allusion à la réforme du marché britannique des IFA. Quels enseignements peut-on en tirer ?

La « Retail Distribution Review » prévoyait une interdiction absolue des rétrocessions de commission, aussi la mise en œuvre de la directive MIF 2 n’aura pas d’impact sur le fonctionnement du marché britannique. Au Royaume-Uni, les clients des IFA, les conseillers financiers indépendants, doivent donc désormais payer une prestation de conseil. En pratique, seuls les plus fortunés ont accès à ce service et le nombre d’IFA a été réduit de 25% environ. Les pays comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas, qui ont décidé ce type de réforme, ont d’ailleurs beaucoup œuvré pour que MIF 2 ne définisse pas un cadre beaucoup plus souple. Il est à noter que si la directive permet d’ailleurs à chaque pays de concevoir des règles plus strictes que le texte européen, que de par la position actuelle du régulateur français, nous ne nous attendons pas à cette évolution en France et nuirait à l’accès large de la population des clients aux produits d’épargne. Le souci permanent du régulateur étant de protéger les épargnants avec un accès à une information et la mise en œuvre de prestation de services de qualités en s’appuyant sur un écosystème d’acteurs large et très professionnel.

 

Pour en savoir plus

MIF 2 : Ce qui va changer pour les conseillers en gestion de patrimoine